Andre Rivoire Photo 3 - CopieCe document n’est ni un historique, ni une biographie et ne vise aucune cible particulière.

Il n’a que le mérite d’apporter mon expérience et mon regard en  matière de médiation après 17 années de bénévolat au service de mes concitoyens.

La naissance du projet:

Récemment retraité, je souhaitais conserver une activité différente du contexte  professionnel dont j’étais issu. L’opportunité de  m’impliquer dans la vie de ma commune s’est présentée.

En effet, à  l’initiative de la Ville de Saint-Genis-Laval, dans le cadre du Contrat de Ville, le Conseil Communal de Prévention de la Délinquance organisait, en Avril 1999, une réunion publique d’information et avec l’aide d’AMELY (Christiane W. directrice) sensibilisait les habitants à la nécessité de mettre en place des médiateurs afin d’améliorer les relations entre les habitants de la ville.

J’ai fait partie des personnes qui ont postulé. Les candidatures ont été soumises au Comité de Pilotage de la Ville comprenant entre autres : Elus, Gendarmerie, Police, Services Sociaux, SACVL, … et AMELY.

Après divers entretiens et présentation des postulants, le Comité a retenu douze candidatures dont la mienne, et en a confié la formation aux techniques de médiation à AMELY dans la période de Septembre et Octobre 1999.

La formation avait lieu localement, tous les samedis, sous l’autorité de Christiane, avec l’intervention quelquefois du maître à penser de l’association (Jean-Pierre BONAFE-SCHMIT).

C’était donc  devenu ‘’l’équipe à Christiane’’ aidée  sur le plan de l’organisation par un représentant de la commune pour le choix du lieu et des horaires des permanences, des moyens matériels, … et en finalité le groupe devait définir son intégration à AMELY ou bien rester autonome sous l’égide de la commune.

Que de réunions, que de discussions, que de lieux différents afin de fixer les choix et l’intégration à AMELY.

 Je me suis senti honoré et reconnaissant d’être investi et reconnu comme légitime dans l’exercice de cette fonction de médiateur.

Officiellement, la médiation de quartier, démarrait en janvier 2000 et pour ne pas perdre le bénéfice de la formation (terminée en novembre) et commencer la pratique de médiation, chacun se trouvait alors un site d’accueil. C’est ainsi que j’ai  fait le choix  temporaire d’une ville que je connaissais  pour y avoir exercé, en partie, mon activité professionnelle.

La pratique de médiation :

Andre Rivoire Photo 1Que dire sur le sujet, sinon qu’il fallait ‘’se jeter à l’eau’’ avec nos moyens propres, sans référents et sans anciens pour nous guider, nous aider, nous orienter.

Parmi nos premiers dossiers je m’en souviens d’un, cocasse, qui mérite d’être cité :

En double, avec mon ami ecclésiastique, nous recevions un plaignant  qui se plaignait du bruit  du lit de sa voisine au-dessus de chez lui, tous les soirs et il pensait avoir affaire à une ‘’prostituée’’.

A notre questionnement de savoir quelle avait été sa démarche préalable, il nous indiquait  qu’il n’avait pas osé aller la trouver pour se plaindre mais il lui avait mis un mot dans sa boîte aux lettres.

La réponse, reçue en retour, l’interloquait  car elle lui proposait de venir essayer son sommier afin d’en vérifier le bruit !

Mon collègue, peu à l’aise dans une telle démarche de médiation, demandait à être remplacé ; mais  l’affaire a tourné court en raison de l’absence de réponse du mis en cause’’. Qu’est-il advenu de leur   relation ?

Formation – Supervision – sensibilisation :

 

Dès la formation initiale, le groupe était invité à faire connaître notre action auprès de la population à tous les niveaux (élus, commerçants, associations, …) par la distribution de tracts les jours de marché, la tenue de stands à chaque occasion favorable, la participation aux réunions des maisons de quartiers …

Le représentant de la commune  assistait aux supervisions mensuelles où  s’échangeaient  des informations générales (vie d’AMELY, de la commune, du groupe) puis il nous quittait afin de garantir la confidentialité dans le traitement de nos dossiers. Ainsi les médiateurs ont été reconnus rapidement par l’Institution et les divers organismes communaux.

Le contrat avec la mairie prévoyait également une formation spécifique annuelle sur le site. Les thèmes  étaient choisis chaque année en fonction des besoins exprimés et traités par un représentant d’AMELY qui saisissait l’occasion pour rappeler  les principes de base de la ‘’méthodologie AMELY’’ !

J’en  retiens personnellement l’importance de la notion d’écoute et de l’étude du comportement des personnes en face de nous et  je garde aussi en mémoire l’adage : « appliquer une procédure de professionnel mais réalisée par des bénévoles »

Évolution dans l’association :

 Bon an mal an le nombre de dossiers restait assez stable annuellement sur le site et compte tenu du nombre de médiateurs d’une part et de la connaissance professionnelle individuelle d’autre part, une ‘’spécialisation’’ s’instaurait naturellement.

Parmi d’autres critères, la répartition ‘’hommes-femmes’’ ainsi que l’âge (le plus jeune d’AMELY, lycéen ainsi que le plus ancien d’AMELY, le doyen) permettaient de faire face à toutes les situations.

Au fil des ans mon évolution s’orientait alors vers des dossiers plus complexes, tels que la médiation dans les relations du travail ainsi que la médiation de groupe qui n’existait pas encore au sein de l’association.

Les principes de base, la méthodologie, la formation spécifique étaient alors définis par des groupes de travail, sur la base d’expériences vécues, et parmi elles :

  • L’expérience de médiation entre deux cadres de haut niveau d’une entreprise nationale basée à VILLEFRANCHE

Par contrat préalable le PDG et son adjoint RH nous donnaient libre accès et carte blanche pour mener les entretiens de ces deux dirigeants, jaloux l’un de l’autre et postulants  aux fonctions supérieures de l’entreprise car performants, volontaires et efficaces.

Les entretiens étaient réalisés dans un hôtel de Villefranche afin d’éviter le contexte du lieu professionnel et, après plusieurs séances d’entretien étalées dans le temps, la restitution de l’accord obtenu entre les protagonistes était développée auprès du responsable de l’entreprise suite à la volonté des parties car, en plus de l’accord, il y avait des remontées à faire au PDG.

  • L’expérience de médiation de groupes : dans la ville de L’ISLE D’ABEAU avec plusieurs collègues médiateurs, suite à une demande municipale relayée par le médiateur de la République (membre d’AMELY).

Cela concernait un groupe de jeunes qui squattait un parking de quartier et gênait les habitants par le bruit de musique tardive, d’insultes, …

Là encore, après avoir défini le contexte avec les représentants de la mairie, les entretiens se déroulaient dans un complexe scolaire, le soir, avec les jeunes en cause, certains habitants, les représentants de la mairie, …

Au cours des discussions nous apprenions que les jeunes étaient aussi ‘’provoqués’’ par la police municipale qui cherchait selon eux un motif d’intervention contre eux alors que les gendarmes ‘’passaient’’ bien auprès des jeunes.

A la conclusion, un local fut prévu pour le regroupement des jeunes, sans gêne pour les voisins et une ‘’remontée’’ fut fait auprès du maire afin qu’il ait  tous les éléments du dossier et connaisse plus précisément son contexte communal.

  • Autre expérience de médiation de groupe : dans un lycée professionnel

              Le contexte : une classe entretient des rapports difficiles voire  conflictuels avec une partie

des enseignants et avec la Proviseure  de l’Etablissement. Pour l’infirmière, la classe est dans une situation de « souffrance » par rapport aux « adultes référents », avec multiplication des incidents, y compris entre élèves,  absences, climat de travail dégradé …

Réponse de l’institution : le Chef d’établissement a organisé une rencontre avec les parents, puis un rappel à la loi des élèves perturbateurs, par la déléguée du Procureur.

Enfin, un conseil de discipline suivi d’exclusion a eu lieu ; une intervention de la Maison de Justice est prévue.

Notre intervention : elle fut  limitée dans le temps compte tenu des stages et de la fin d’année scolaire, aussi le nombre de médiateurs était conséquent.

Nous présentons notre intervention à la direction du lycée et aux enseignants avant d’aborder les élèves de la classe concernée.

La classe est divisée en plusieurs groupes et après les réunions d’écoute une synthèse des problèmes en lien avec des adultes du lycée a été validée par la classe.

Nous programmons une réunion commune professeurs – élèves mais  certains enseignants ne veulent pas y participer. Les élèves refusent alors de se présenter car pour eux il manquait les vrais mis en cause.

Pour moi, ce fut un semi-échec : certes le processus de médiation n’a pu aller à son terme mais  la restitution et les divers échanges auront néanmoins facilité la prise de parole de chacun,  permis d’abaisser le niveau de tension pour la  fin d’année scolaire et peut-être amorcer  une meilleure compréhension entre les protagonistes dans ce monde particulier d’un établissement scolaire

Mon expérience d’animateur au sein de ces deux groupes de travail comme les permanences de médiation sur le site, m’ont convaincu  de  l’utilité  d’une association comme AMELY  au service de tous les citoyens sans distinction.

Ces expériences, menées en dehors des permanences du site de Saint-Genis, m’ont conforté dans l’utilité de cette association d’interventions. Elle développe pour ceux qui acceptent d’y participer, l’ouverture d’esprit et la qualité de l’écoute nécessaires à un médiateur.

Mon dernier dossier, délicat et à rebondissements, mérite aussi d’être cité:

Il s’agit d’une contestation au sein d’un Conseil Syndical de copropriété, avec mise en cause indirecte de la Régie.

La plaignante (accompagnée d’une autre copropriétaire) évoque une série de griefs  à l’encontre de certains membres du Conseil et particulièrement du Président.  Or, alors que le Président avait répondu favorablement à notre invitation de venir exposer son point de vue, la plaignante devenue présidente à l’issue d’une Assemblée Générale qui avait eu lieu  quelques jours après sa venue dans nos locaux, nous informe qu’elle renonce à une médiation. Ma collègue et moi-même avons la désagréable impression que la médiation a été instrumentalisée.

Cependant nous maintenons le rendez-vous programmé avec  le désormais ancien président. Il se présente, nous donne sa version des faits  et  il devient à son tour plaignant contre celle qui voulait arrêter la médiation, mais pour d’autres raisons.

Leur mérite, cependant, est d’avoir accepté de se retrouver autour d’une table sous notre égide : d’uns part  la nouvelle présidente assistée de sa fidèle seconde et d’autre part  le président déchu, voire accusé de malversation, assisté lui aussi par un collègue de gestion de copropriété (un ex-président  de Conseil Syndical antérieur).

Il a fallu gérer ce mini groupe et, après une première période  d’empoignade, chacun ayant des faits à reprocher à l’autre,  allant même jusqu’à une mise en cause de l’honnêteté de l’autre, les échanges prennent un tour plus constructif, chacun en venant  à comprendre l’importance de préserver les relations à venir.

Finalement et non sans mal,  un accord de médiation, sur une procédure de clarification à destination de l’ensemble des copropriétaires,  a été obtenu.

Les médiateurs ont eu la satisfaction de voir leur action reconnue par  une remise de deux dons pour l’association.

Réflexion :

 Sur plus de quinze années de pratique et sans vouloir jouer au ‘’sociologue’’ je constate cependant que nous suivons de près l’évolution de la société en général ; en effet :

  • Dans le premier quinquennat (2000 / 2005), la majorité des dossiers étaient orientés vers la médiation de quartiers, avec ses problèmes de voisinage en particulier.
  • Le deuxième quinquennat (2005 / 2010) a vu se développer les problèmes de liaisons indirectes entre particuliers et professionnels liés surtout avec le développement des contrats Internet, téléphonie, …
  • Le quinquennat suivant  (2010 / 2015) voit arriver des dossiers plus personnels dans le cadre de la relation familiale conformément à l’évolution de notre société.

Alors, longue vie à l’association AMELY (son équipe de bénévoles et professionnels)qui m’a permis, entre autre, de  ne pas voir le temps passer et de garder l’esprit curieux, serein et plein d’optimisme.

Avril 2016

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